Détention de la résidence principale au sein d'une SCI: bonne ou mauvaise idée ?
Détention de la résidence principale via une société et mise à disposition à titre gratuit : bonne ou mauvaise idée ?
Si l’achat de la résidence principale par l’intermédiaire d’une société translucide à l’IR (Impôt sur le Revenu) est parfois présenté comme un schéma intéressant fiscalement, il convient d’être prudent quant aux situations dans lesquelles sa constitution est réellement utile. Petit tour d’horizon sur les avantages et inconvénients de ce mode de détention.
- IFI
L’IFI s’applique pour tout patrimoine immobilier ayant une valeur nette de plus de 1,3M€ au 1er janvier.
En cas d’assujettissement à cet impôt, la détention en direct de la résidence principale permet au foyer fiscal de bénéficier d’un abattement de 30% sur la valeur de celle-ci.
En revanche, en cas de détention d’un bien immobilier constituant la résidence principale de l’un ou plusieurs des associés de la SCI via une mise à disposition à titre gratuit, cet abattement est perdu.
- Plus-value immobilière
Concernant la revente de la résidence principale détenue en direct, celle-ci bénéficie d’un régime d’exonération totale de la plus-value prévue par l’article 150 U du CGI.
La détention via une SCI ne permet pas de bénéficier de cette exonération, sauf à ce que le bien ait été mis à disposition à titre gratuit de l’un des associés par la SCI.
Par contre, l’exonération ne portera que sur la quote-part de détention des parts de chaque associé dans la SCI dont le bien constitue la résidence principale1, et non sur la totalité de la plus-value. Dès lors, des parents qui apporteraient leur résidence principale à une SCI dont ils seraient associés à 51% ne bénéficieraient que d’une exonération partielle sur la plus-value de cession (51%) calculée à compter de l’entrée dans le patrimoine de la SCI (apport ou acquisition à titre onéreux) de bien immobilier.
Ainsi, en cas de présence d’enfants au capital social de la SCI et de cession ultérieure du bien, ceux-ci seront soumis à la plus-value immobilière des particuliers avec application des abattement pour durée de détention, avant imposition au taux de 19% de leur quote-part de plus-value, ledit bien ne constituant pas pour ces derniers, leur résidence principale.
- Succession
Lorsque le bien immobilier constitue le logement familial des époux au jour de la liquidation du régime matrimonial pour cause de décès et que ledit bien se retrouve dans la succession du 1er époux décédé, un abattement de 20% est applicable sur la valeur du bien au titre du calcul des droits de succession. Ce mécanisme permet donc aux héritiers (hors conjoint car exonéré de DMTG) de diminuer la valeur taxable au titre des droits de succession.
En cas de détention d’un bien immobilier constituant la résidence principale de l’un des associés via une SCI, l’abattement de 20% précité est perdu.
- Droit temporaire et droit viager au logement
Au décès de l’un des membres du couple marié, le conjoint survivant se voit attribuer une protection spécifique sur le bien immobilier constituant la résidence principale et le logement familiale des époux.
Le conjoint survivant bénéfice :
- Un droit temporaire au logement de 12 mois à titre gratuit.
- Un droit viager permettant au conjoint survivant de jouir du logement toute sa vie durant, sous la même condition d’occupation effective à titre de résidence principale. Ce droit viager doit être demandé au cours des 12 mois suivant le décès.
En détenant la résidence principale au sein d’une SCI, le conjoint survivant marié perd ces deux droits prévus par le code civil.
Afin de remédier à tout éventuel conflit avec les enfants, notamment dans les familles recomposées, il sera alors intéressant de procéder au démembrement croisé des parts entre les époux. Ainsi, chacun détiendra 50% de ses propres parts sociales en nue-propriété et celles de l’autre en usufruit.
Conséquence : au décès de l’un des époux, le conjoint survivant conserve l’usufruit des parts du défunt, les héritiers recevant la nue-propriété des parts, et devient plein propriétaire des parts dont il détenait jusqu’à présent que la nue-propriété.
En l’absence d’un tel schéma au sein d’une SCI, aucune protection n’est assurée pour le conjoint survivant sauf à prévoir une co-gérance ou gérance de substitution à son profit avec une part en pleine propriété et décision à l’unanimité des associés dans les statuts pour le révoquer et revenir sur la décision de mise en disposition à titre gratuit du bien immobilier.
- Transmission
En cas de détention en direct de la résidence principale, les héritiers seront coindivisaires, rendant la prise de décision difficile sur la gestion et devenir du bien, en cas de mésentente. La SCI permet de sortir du régime contraignant de l’indivision et des blocages éventuelles même si personne ne peut être contraint de rester en indivision (article 815 code civil).
De plus, la transmission par voie de donation de parts de SCI présente certains avantages et des décotes peuvent être appliquées sur la valeur des parts transmises par donation/succession qui ne seraient pas applicables en cas de détention en directe :
- Décote comprise entre 5% et 20% , du fait de la non-liquidité des parts de SCI et de l’occupation du bien
- Prise en compte des dettes contractées de la SCI.
- Décote jusqu’à 10% pour occupation
- Décote jusqu’à 10% pour parts minoritaires de la SCI transmises aux héritiers.
- Décote possible également en cas de pacte d’actionnaire limitant les pouvoirs des nouveaux associés héritiers
Le prêt sur le bien constituant la résidence principale d’un des associés permet d’être pris en compte dans la valorisation de la SCI. Conduisant à une diminution des droits de donation éventuellement dus par le(s) donataire(s). Ce qui n’est pas le cas lors de la détention en direct de la résidence principale.
La détention de la résidence principale par le biais d’une SCI est donc une bonne idée si les époux sont dans une optique de transmission de leur patrimoine, à condition de prendre les mesures nécessaires au maintien du survivant dans le logement. Il est donc nécessaire d’effectuer une analyse précise des avantages et inconvénients, au regard de sa situation patrimoniale et familiale et des dispositions éventuelles déjà mises en place.